Un poste frontière à Ortenberg
En 2023, cela fera 100 ans qu'une frontière passait ici, dans le virage de la gare. Un peu plus de quatre ans après la fin de la Première Guerre mondiale, des unités militaires françaises et belges occupèrent la région de la Ruhr, car l'Allemagne n'avait pas pu payer les réparations fixées en 1921 par les puissances alliées victorieuses dans "l'ultimatum de Londres". La production de charbon, entre autres, a été placée sous un contrôle strict afin de pouvoir la revendiquer comme les réparations fixées.
Cette "occupation de la Ruhr" et le mouvement de résistance qui s'en est suivi, appelé "Ruhrkampf", sont entrés dans les livres d'histoire. Mais ce qui est passé plus ou moins inaperçu dans toute l'Allemagne et qui est presque tombé dans l'oubli, c'est le fait que la "tête de pont de Kehl" occupée par les Français s'est étendue, presque en même temps que l'occupation de la Ruhr, à d'autres communes de l'Ortenau et, le 20 avril 1923, à des parties d'Ortenberg. Depuis les années 1800, c'était la première fois qu'Ortenberg était occupé par des troupes étrangères. L'occupation dura du 20 avril 1923 au 18 août 1924.
Pendant 16 mois, la "frontière" entre les territoires occupés et non occupés passa par Ortenberg. Dans le virage stratégique de la gare, des soldats français patrouillaient devant un cabanon de sentinelle bleu blanc rouge. Une barrière éclairée pendant la nuit et deux mitrailleuses en position empêchaient tout passage incontrôlé.
Les soldats avaient pris leurs quartiers dans le restaurant de la gare situé en face, où se trouvait également le poste de commandement. Ce "poste frontière" était ainsi le point le plus au sud des territoires occupés par les Alliés en Allemagne.
Sous le signe de l'entente entre les peuples, la commune d'Ortenberg et sa commune jumelée française de Stotzheim, liées par l'amitié depuis 1965, reviennent sur cet épisode de leur histoire commune. Elle est soutenue dans cette démarche par le Fonds citoyen franco-
allemand, la Fondation des citoyens Gertrud von Ortenberg et l'Association du musée et de l'histoire d'Ortenberg.
L'interruption de la ligne de la vallée du Rhin entre Renchen et Niederschopfheim et de la ligne de la Forêt-Noire entre Ortenberg et Offenburg, qui accompagnait l'occupation, entraînait de grandes difficultés pour les voyageurs en train. Lors de l'un de ses voyages en
Forêt-Noire, le futur prix Nobel de littérature Ernest Hemingway en a fait les frais. Venant du nord, il ne put reprendre le train qu'à Ortenberg : "D'Offenburg à Ortenberg, où il y avait un train, j'ai voyagé dans un camion. ....", écrit-il dans son article "The 'Battle' of Offenburg" pour
le Toronto Daily Star.